Yulianna Avdeeva au piano et Alexander Sladkovsky à la direction d’orchestre à La Roque d’Anthéron
08.08.2018 | WUKALI Une nuit époustouflante
A fantastic concert
Qui peut croire qu’un concert de musique classique ne peut pas électriser son public à la manière d’un concert rock ? En tout cas, ce jeudi 26 juillet, dans le parc du château de Florans de la Roque d’Anthéron, les cigales ont dû interrompre leur frénétique chant, ou alors, c’est qu’on ne les entendait plus, tant il est vrai que du son, et du bon, arrivait jusqu’à nous avec force et liberté. Et la fin du concert ! ! Ô ce final, ces bis, ce chef d’orchestre qui « met le feu »… Mais commençons par le début !
Yulianna Avdeeva arrive sur scène dans une tenue sombre, pantalon noir, tunique verte, cheveux ramenés en chignon, elle nous sourit avec douceur, salue le chef de l’Orchestre Symphonique du Tatarstan, le charismatique Alexander Sladkovsk. L’homme paraît de prime abord pas très commode, rigide dans sa direction des musiciens, mais rapidement, au fil de la soirée, il va se livrer, se libérer, sortir de sa carapace et dévoiler un pan de sa personnalité que le public va adorer.
Peu à peu aussi, doucement, le concerto pour piano et orchestre N°3 de Rachmaninov qui débute la soirée, affichera sa soif de liberté, sous les doigts de Yulianna Avdeeva, moins réservée qu’il n’y paraît devant ce défi de technique et d’interprétation. La jeune femme, à la silhouette filiforme dégage une force peu commune, nul besoin d’avoir des mains de colosse pour doter le discours d’une extrême autorité, et faire montre tout à la fois de puissance et de finesse. Le panache au bout de ses doigts, ses mains disparaissent presque tant elles tournoient et pirouettent sur les touches ! On aime cet Intermezzo : Adagio. L’orchestre brille et monte en puissance. Quel formidable jeu des cordes se mêlant à la généreuse complicité des altos, alors que les vents semblent se soulever pour entonner leur choral. Le Finale : Alla breve nous transporte. Le public est heureux, la flûte solo nous enchante, la cohérence et l’harmonie est installée entre tous. Tout le parc de Florans est en émoi. Le public n’aura pourtant pas tout vu, tout entendu.
La jeune femme disparaît et son piano glisse dans un coin de la scène. Après l’entracte, place à P.I.Tchaîkovsky et sa symphonie en mi mineur opus 64 qui déversera toutes les couleurs du destin. Une musique toute centrée sur le destin lui même, et il y a fort à dire ! Entre le thème exposé dans un premier temps en douceur, la marche toute empreinte de tristesse et de gravité, et autour d’elle, les musiciens qui s’exposent en solo… Des musiciens touchés par la grâce, ou disons touchés aussi par la baguette magique de leur chef. Les cuivres sont à eux seuls « le destin », dans leur façon brutale de l’aborder et de nous « rappeler » à l’ordre, de glisser vers la noirceur. De longs crescendos, des tensions, du désespoir, et arrive le finale qui ne manque pas de panache. « Un peu trop », dirons certains. Mais tout respire avec tellement de naturel, même s’il est vrai que ces Russes-là ont le sens de la démesure. Cela n’est il pas propre à l’œuvre de Tchaïkovski ? En tout les cas, les spectateurs n’ont pas fini d’être étourdis, bousculés même, et le terme n’est pas trop fort. Que de belles surprises !
On est bien loin du bis de Yulianna, un superbe Chopin,Nocturne n°20 en do dièse mineur, une merveille de délicatesse. Le premier bis de l’orchestre du Tatarstan nous offre un enthousiasmant Casse-noisette de Tchaïkovskiop 71 la Trepak (danse russe). A la fin de ce morceau, le public se lève et crie. C’est d’accord, un second Bis est offert, avec bonheur et générosité. Il s’agit de la Danse Espagnole extraite du Lac des Cygnes. Un air magnifique et une interprétation là encore remarquable. Le public est heureux et le clame haut et fort ! Continuons donc la série des bis, mais cette fois-ci, ce sera le dernier ! « Stan Tamerlara », de Tchaïkovsky…. D’Alexander Tchaïkovski qui n’a rien à voir, du point de vue stylistique déjà, avec le célèbre P.I. Tchaikovsky… Celui-ci est né à Moscou 19 février 1946, et c’est avec lui, un peu de folie en supplément. Ecoutez ce qui suit :
La vidéo ne montre pas le public et dans une salle, c’est bien différent. Hier soir, on tapait des mains et des pieds sur les gradins. Oui, il était temps de rentrer se remettre de tout ça. Il est quand même presque 1 h du matin et il a fait très chaud au parc de Florans de la Roque d’Anthéron !